
Déclaration du Labour 7 au G7: Mettre la justice sociale au cœur de la coopération internationale
Le G7 se réunira en 2025 en temps de profondes réorganisations et tensions géopolitiques. Pendant que le monde est divisé devant les menaces existentielles et les défis mondiaux, le G7 a pour responsabilité de réaffirmer les principes fondamentaux sur lesquels repose l’ordre international fondé sur des règles : le respect des droits de la personne et la primauté du droit, la coopération internationale, la paix et la démocratie.
Les conflits armés causent d’énormes souffrances et ont de dévastateurs effets d’entraînement à l’échelle mondiale. Les syndicats et le Labour 7 sont solidaires des personnes affectées par les guerres sur tous les continents, luttant pour défendre leurs libertés, la justice sociale, la démocratie, leurs droits et ceux des générations futures. Le Labour 7 incite les membres du G7 à mettre leurs divisions de côté et à réaffirmer leur engagement à défendre les droits de la personne et le droit humanitaire international et à promouvoir la paix et le respect des principes consacrés dans la Charte des Nations unies.
Ces derniers mois, les différents pays ont trouvé les ressources nécessaires pour accroître considérablement les dépenses militaires, alors qu’ils affament de ressources les services publics depuis plus d’une décennie dans le cadre d’un assainissement des finances publiques et de politiques d’austérité malavisées. La course à l’armement ne doit pas compromettre les dépenses sociales ni priver les pays et leurs populations des investissements nécessaires dans les domaines de la santé, de l’éducation, des infrastructures, de la transition écologique, de la création d’emplois, du perfectionnement des compétences et de la protection sociale. Dans les pays membres du G7 et autres, l’augmentation de l’inégalité, la dégradation de services publics essentiels et la crise du coût de la vie, comme la pauvreté en emploi, demeurent des réalités pour des millions de travailleuses et travailleurs et leurs familles. Les membres du G7 devraient s’engager à adopter des politiques économiques, budgétaires et en matière d’emploi qui favorisent la négociation collective et l’augmentation des salaires réels, la création d’emplois décents, la réduction des inégalités et la transition juste vers une économie carboneutre. Ils doivent adopter d’urgence des politiques permettant d’éliminer toutes les formes de discrimination, notamment à l’égard des femmes, des groupes vulnérables, des LGBTQI+, des minorités ethniques et des personnes en situation de handicap.
L’année 2024 a été la plus chaude jamais enregistrée, et les perturbations environnementales se multiplient, ce qui a de graves conséquences humanitaires, sociales et économiques, y compris dans les pays du G7. Les travailleuses et travailleurs sont en première ligne de la crise, exposés à la fois à la dégradation de l’environnement et à celle de leurs conditions de travail ainsi qu’à la transformation radicale du marché du travail. Le G7 et ses membres ne peuvent pas faire mine de rien — ils doivent s’engager à créer des voies d’accès à la carboneutralité fondées sur les données scientifiques et à adopter des contributions déterminées au niveau national (CDN) axées sur une transition juste qui assure la défense et la promotion des droits fondamentaux du travail, y compris la négociation collective. Le G7, qui rassemble certains des plus gros émetteurs de gaz à effet de serre ainsi que producteurs et consommateurs de combustibles fossiles, doit assumer sa responsabilité et s’engager à accroître le financement de la lutte contre les changements climatiques et à mettre de l’avant une transition juste pour la main-d’œuvre, conformément à l’Accord de Paris et aux Principes directeurs de 2015 de l’OIT.
Puisque les marchés du travail sont grandement affectés par les changements climatiques, l’avancement de l’intelligence artificielle et les transformations démographiques, le dialogue social est nécessaire pour voir à ce que les coûts et les avantages de ces changements soient partagés équitablement au sein des sociétés. De plus, en tant que droits habilitants fondamentaux, la liberté d’association et le droit de négocier collectivement jouent un rôle essentiel dans l’assurance de conditions de travail décentes, notamment en permettant de mettre en application des salaires suffisants pour vivre et l’interdiction de la discrimination, en favorisant la cohésion sociale et en stimulant le développement économique inclusif. Le Labour 7 incite les membres du G7 à appuyer les efforts faits par les travailleuses et travailleurs pour se syndiquer et négocier collectivement, à la fois au sein des pays du G7 et dans d’autres pays, car ce sont des facteurs de développement durable. Le G7 doit bien tenir ses engagements antérieurs, y compris ceux que comprend le Plan d’action du G7 sur l’intelligence artificielle adopté en 2024.
Toutefois, au niveau mondial, il y a des preuves que les violations des droits syndicaux augmentent, comme l’illustre l’Indice CSI des droits dans le monde. Les pays subissent des revers très marqués en matière de développement, accompagnés d’augmentations de la pauvreté qui empêchent l’accès à l’éducation et aux soins de santé et l’exercice d’autres droits fondamentaux de la personne, y compris le droit à l’égalité entre les genres. La plupart des personnes vivant dans la pauvreté extrême ont un emploi, mais ne gagnent pas un salaire suffisant pour vivre. La majorité des membres de la population active travaille dans l’économie informelle, où près de la moitié des gens ne bénéficient d’aucune forme de protection sociale. Les guerres commerciales pourraient faire empirer la situation. Le G7 devrait promouvoir l’uniformisation des règles du jeu à l’échelle mondiale fondée sur les normes internationales du travail. Les membres du G7 doivent particulièrement respecter les principes et droits fondamentaux au travail établis par l’OIT, favoriser la fixation par l’OMC de règles commerciales qui encouragent la ratification et la mise en œuvre des conventions fondamentales de l’OIT et permettre aux gouvernements d’adopter des politiques faisant la promotion du travail décent et assurant la tenue des engagements à l’égard du développement durable pris dans les accords commerciaux.
L’insuffisance du financement des ODD (objectifs de développement durable) mondiaux continue d’augmenter, malgré des situations alarmantes de sous-développement et de déficit de travail décent. Si elle continue d’augmenter au même rythme que de 2015 à 2023, l’insuffisance en question atteindra 6,4 billions de dollars des É.-U. d’ici 2030, selon l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). Il est probable que la politisation et la très forte réduction de l’aide publique au développement (APD) accéléreront la tendance. Entre-temps, la crise de la dette s’intensifie : 92 pays devant avoir consacré plus de fonds au service de la dette qu’aux investissements dans les ODD en 2024. Dans ce contexte, avant la 4e Conférence sur le financement du développement (qui aura lieu du 30 juin au 3 juillet 2025), le Labour 7 incite le G7 à prendre un engagement clair à réformer l’architecture financière internationale et à honorer son engagement à affecter 0,7 % du RNB à l’APD. Le Labour 7 incite également le G7 à hausser le financement à la fois de la lutte contre les changements climatiques et du développement, notamment en accroissant le soutien à l’aide des finances publiques et en adoptant des outils macroprudentiels supplémentaires applicables aux finances privées ainsi que par des mesures visant à réduire le coût du capital des pays en développement. Pour le L7, le Jubilé 2025 est une occasion de progresser et d’arriver à un consensus sur l’annulation de dette et le refinancement durable des dettes publiques.
Ce climat et la crise du financement du développement sont nés en dépit du fait que le monde s’enrichit et dispose des ressources nécessaires pour atteindre les objectifs internationalement convenus. Toutefois, la richesse mondiale n’a jamais été répartie plus inéquitablement. À l’heure actuelle, les 1 % des personnes le plus riches du globe ont une fortune qui dépasse celle de 95 % de l’humanité. La concentration de la richesse et l’augmentation du pouvoir des entreprises ont permis à de grandes entreprises de jouer un rôle de plus en plus important — et déstabilisant — dans l’établissement des règles et des programmes mondiaux. Le Labour 7 incite le G7 à inscrire la réduction de l’inégalité, tant entre les pays qu’au sein de ceux-ci, au cœur de ses travaux — notamment par une fiscalité équitable et progressive et la promotion d’une conduite responsable des entreprises. Les membres du G7 devraient appuyer les travaux entrepris par le G20 en vue de l’adoption d’un impôt mondial sur la fortune des ultra-riches et promouvoir un impôt sur les transactions financières ainsi que les bénéfices exceptionnels des multinationales. Ils devaient également appuyer activement les négociations en cours en vue de l’établissement d’une convention-cadre de l’ONU sur les impôts qui ferait fond sur les initiatives de coordination des impôts prises par le G20 et l’OCDE. De plus, le G7 devrait intensifier ses travaux pour assurer la transparence et la reddition de comptes des entreprises par voie des négociations de l’ONU qui se poursuivent au sujet d’un traité contraignant sur les entreprises et les droits de la personne.
Le Labour 7 rappelle qu’il est disposé à collaborer étroitement avec le G7 au renforcement du multilatéralisme. En ces temps difficiles, il est plus important que jamais que le G7 prenne un engagement transparent et valable avec ses partenaires sociaux, soit le Labour 7 et le Business 7. Nous nous attendons à ce que le G7 respecte ses principes et réaffirme son engagement à l’égard des valeurs de la coopération internationale, de la démocratie et des droits de la personne.